Miroir de la nature, source et modèle de philosophie de la vie, l’Ikebana est l’art de faire vivre les fleurs (Ikeru signifie « respirer, être vivant », bana ou hana signifie « fleurs »).
Plus que millénaire, cet art est apparu au Japon au début du 7ème siècle, venant de la Chine. La dynastie Tang rayonnait alors sur le monde oriental, et les ambassadeurs japonais du prince SHOTOKU ramenèrent au Japon, avec le bouddhisme, les rites d’offrandes florales aux autels bouddhiques. Le plus connu de ces ambassadeurs fut ONO-NO IMOKO, qui se convertit au bouddhisme, pris le nom sacerdotal de SENMU et consacra sa vie à orner l’autel de Bouddha et à enseigner la compréhension des fleurs dans un petit temple, le ROKKAKUDO, situé près d’un étang, dans la ville qui allait devenir Kyoto.
Il enseignait la rigueur d’une composition trinitaire à l’origine du premier bouquet vertical composé de trois fleurs, une haute et deux plus basses, le TATEBANA, ancêtre du RIKKA et du SHOKA.
L’ermitage de SENMU allait devenir plus connu sous le nom d’IKENOBO, qui signifie littéralement « la résidence du prêtre près de l’étang ».
Depuis lors, des générations de grands maîtres porteront ce nom d’IKENOBO.
Au Xème siècle, cet art sacré pratiqué uniquement par les moines gagna la cour, séduite par son esthétique. Seuls les hommes cultivés et de haute lignée (prêtres, seigneurs, samouraïs…) étaient initiés à cet art.
Au XIIème siècle, les rites bouddhiques commencèrent à se célébrer aussi dans l’espace privé et s’étendirent des cérémonies aux fêtes, les bouquets sortirent des temples.
Le XVème siècle sera un vrai siècle fondateur. En 1445 parut le plus ancien ouvrage sur le sujet, le SENDENSHO. Ce traité rassemblait des instructions précises sur la manière d’utiliser les arrangements floraux pour différentes circonstances de la vie, que recueillit l’école IKENOBO. C’est aussi en 1462 que le grand maître Senkei IKENOBO formula de manière très précise les règles de l’Ikebana et fit sensation en créant le style RIKKA, toujours à l’honneur aujourd’hui.
Au XVIème siècle, après les codifications du XVème, paraît le traité SENNO KUDDEN, le RIKKA y devient la représentation symbolique d’un paysage mythique des montagnes de Chine (les monts Shumisen). Il recrée les montagnes, les lacs, les chutes d’eau, l’ombre et le soleil. C’est l’aboutissement du RIKKA.
Sous le règne d’HIDEYOSHI, le maître SEN NO RIKYU va en même temps créer des RIKKAS monumentaux pour orner ses palais, mais aussi créer le CHABANA (littéralement « fleurs du thé », arrangement très simple représentant l’idée du « Wabi », raffinement dans la simplicité), et le NAGEIRE (littéralement « lancé », ou « jeté »).
Au XVIIème siècle, sous le shôgunat des Tokugawa, fut institué la transmission héréditaire des Iemotos, encore en vigueur aujourd’hui, pour garantir la transmission des savoirs, et s’amorcera la démocratisation de la pratique, avec le développement de la classe marchande.
Au XVIIIème siècle, cette démocratisation permis aux femmes de pratiquer un art jusque là réservé aux hommes. Le style SHOKA apparaît alors, qui revient aux schémas trinitaires des premières compositions.
A la fin du XIXème, l’ouverture du Japon à l’Occident fait arriver de nouvelles variétés de fleurs et de végétaux et se développera le style MORIBANA.
Unshin OHARA va créer sa propre école en 1895.
Au XXème siècle, le style libre ou JIYUKA va se développer. Pour rompre avec les traditions de création des arrangements floraux dans le Tokonoma, des artistes inspirés par l’art contemporain créeront de nombreuses écoles, à commencer par l’école SOGETSU, fondée par Sofu TESHIGAHARA en 1927.
Les écoles et les styles sont aujourd’hui nombreux, plusieurs milliers au Japon, mais trois grandes écoles représentent les principaux courants de l’Ikebana : IKENOBO, OHARA et SOGETSU.